
Le Musée du
Clockarium est installé à Bruxelles dans une belle maison
Art-Déco construite en 1935 par l'architecte belge G. Bossuyt.
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Dans le hall
d'entée, une superbe fontaine Art Déco témoigne du style qu'a
conféré l'architecte
belge G. Bossuyt à cette maison bruxelloise art déco.
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Le Clockarium, une maison mitoyenne Art Déco
par Cécile Schaack, historienne de l'Art
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>> Caractéristiques générales
C’est en 1935 que l'architecte Gustave Bossuyt
construit la maison mitoyenne qui abrite aujourd’hui le Clockarium.
Construite comme domicile d'un entrepreneur du bâtiment, cette habitation
illustre bien la façon dont l’esthétique «Art Déco» s’inscrit dans une
maison bourgeoise traditionnelle de l’entre-deux-guerres.
Sise boulevard Reyers, ce n’est ni la villa de rentier des très beaux
quartiers de Bruxelles, ni la petite maison ouvrière. Mitoyenne, elle est
d’abord une maison individuelle et refuse catégoriquement le nouveau style de
vie prôné à l’époque : la vie en appartement. En 1935 encore, beaucoup de
Bruxellois restent attachés à l’idée de la propriété privée individuelle.
Autre constante bruxelloise qui traverse le temps et les modes et que l’on
retrouve dans cette construction : le décrochement en façade (bow-windows qui
marque le bel étage) ; il est caractéristique d’un habitat attaché aux
habitudes constructives plus qu’à une « modernisation » des idées.
Le Clockarium est une maison construite en zone en retrait (zone "non
aedificandi") prônée dans l’urbanisme du XIXè s., qui était extrêmement sévère
et planifié. Le bd Reyers, tout comme les boulevards Brandt Whitlock et
Lambermont, fût planifié par Victor Besme début du XIXè s. L’idée de verdure
est essentielle dans cet urbanisme et différentie la typologie de standing
moyen de la typologie standard (maison mitoyenne à front de rue). Cet
urbanisme vert a pour objectif d’amener les bourgeois dans certaines allées
plus prestigieuses. Ce visage de « beau quartier » a disparu avec les années
’70 qui ont transformé l’avenue en route rapide (viaduc) ainsi que toute la
ville en « tout à la voiture ».
>> Description de la façade
Sur le soubassement de la façade sont inscrits la date du permis de bâtir,
1935, et le nom de l'architecte, Gustave Bossuyt (lequel habitait boulevard
Lambermont).
Ce bâtiment est une maison mitoyenne de 4 niveaux construite pour un
entrepreneur. Le rez-de-chaussée est en pierre bleue avec porte piétonne et
porte de garage. Les étages, actuellement enduits, étaient prévus en pierre
blanche.
Le bow-window, mettant en évidence le « bel étage », est surplombé d’un
balcon. Les gardes corps en ferronnerie au 2ème et 3ème étages sont d’origine.
Le châssis du 2ème, à l’origine tripartite et comprenant des vitraux
décoratifs, a été remplacé par un châssis métallique en 1953. A la même
époque, la terrasse plate, la pergola et l’auvent du 3ème étage ont été
supprimés pour construire une chambre supplémentaire en façade. Cet ajout en
façade est visible de par la différence des matériaux mis en œuvre (parement
de briquettes blanches, actuellement peintes et corniche saillante de quartz).
A l’origine, le jardin avant était clôturé par une barrière en ferronnerie
du même type décoratif que les ferronneries des portes et gardes corps.
>> Plan intérieur
Voir le plan original du rez-de-chaussée et du premier étage sur le
site de l'inventaire du patrimoine bruxellois.
Rez-de-chaussée :
- Garage automobile
- Zone d’accueil à l’avant : 1. vestibule, 2. hall d’attente avec banc et
fontaine, 3. hall d’accueil & escalier d’honneur.
- A l’arrière : 1. bureau, 2. vestiaire, WC et passage vers la laverie
(tout à l’arrière) et vers un escalier de service donnant sur la cuisine au
1er étage.
Premier étage (bel étage) :
- Hall d’arrivée et palier vers l’étage
- Salon (pièce vers l’avant / coté rue)
- Salle à manger (pièce vers l’arrière / coté « jardin »)
- Cuisine (la cuisine a été agrandie en 1986 et un nouvel escalier de
service a été créé lorsque la maison a été transformée en restaurant).
Deuxième et troisième étages :
- 2ème étage : 3 chambres et une salle de bains, balcon à l'avant (côté
rue).
- 3ème étage : 2 chambres à l'arrière et 1 grande pergola à l'avant qui
fut transformée en 1953 en une 3ème chambre avec salle de bain et balcon.
>> Quelques caractéristique de l’entre-deux-guerres
Le garage automobile :
Période qui découvre la voiture et généralise la construction des garages.
La situation du garage au rez-de-chaussée provoque des modifications dans le
plan de la maison. A la même époque, l’étage de service semi enterré que l’on
retrouve traditionnellement vers 1900 disparaît. La domesticité se réduit et
ne nécessite plus dans les maisons de standing moyen de locaux spécifiques. Le
« bel étage », qui surplombait la cuisine-cave, se voit ainsi remonté au
premier étage. La conséquence de ce changement devrait être une volée
d’escalier plus conséquente à franchir pour entrer dans l’espace de réception…
Les maisons de l’entre-deux-guerres résolvent d’une part cette problématique
en poursuivant une proposition art nouveau : intégrer totalement l’escalier
dans l’espace de vie.
Les plafonds plus bas :
La hauteur de la cage d’escalier en est d’autant diminuée. Les structures
plus trapues répondent en cela à un nouveau souci d’économie. Les moyens
financiers des commanditaires de l’entre-deux-guerres sont légèrement plus
modestes que ceux de leurs aïeux : "pour 2 niveaux d’autrefois, vous pouvez
aménager 3 niveaux aujourd’hui". Cette évolution vers le plus « trapus »
répond d’autre part très bien ou goût de l’esthétique Art Déco qui privilégie
les formes horizontales aux formes verticales (cf. aussi traitement
horizontal en façade, corniches saillantes et bandeaux décoratifs).
>> Quelques caractéristiques de l’esthétique décorative Art Déco
Le bâtiment comporte plusieurs éléments de décoration luxueux qui
seraient mieux à leur place dans un hôtel de maître que dans une simple
maison, probablement parce que le maître d'ouvrage, un entrepreneur du
bâtiment, voulait s'en servir pour démontrer son savoir-faire :
- Travail particulièrement soigné développé autour du vestibule et du hall
d’attente : 2 arrêts de qualité avant de monter vers l’espace de réception
(marbres noirs et vert plaqués au sol et murs, traitement de l’encadrement
de la fontaine en mosaïque et dessus de banc en plaque métallique martelée.
- Fontaine murale : les jeux d’eaux sont récurrents, avant
tout dans des hôtels de maître plus conséquents où le hall d’accueil est
conçu comme un espace fermé.
- La cage d’escalier est surmontée d’un vitrail monochrome géométrique où
un dessin abstrait se développe. Rampe d’escalier en bois décorée de motifs
géométriques.
- L’éclairage est indirect, au néon, la nouvelle source d’éclairage; il
souligne la linéarité et l'horizontalité des espaces intérieurs. Les
plafonniers sont en pâte de verre, toujours décorés des motifs géométriques
typiques de l'art déco.
- Pour donner de la texture au mur, on préfère le crépi au papier peint
et l’enduit en façade.
Voir le descriptif du bâtiment du Clockarium sur le site de l'inventaire du
patrimoine architectural de la Région de Bruxelles-Capitale...